Grand débat

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L'UR CFTC ET LE GRAND DEBAT SUR LA SANTE

Par Le 29/03/2019

Le 18 septembre 2018, le Président de la République annonçait une stratégie de transformation du système de santé s'articulant sur 3 principes :
• la qualité des prises en charge, en plaçant l'usager au centre du dispositif ;
• une structure de l'offre en renforçant l'accès aux soins par un maillage territorial de proximité
• des métiers et des modes d’exercice repensés.

Or lors de l'ouverture du grand débat les questions de santé n'en faisaient pas partie. Les citoyens s'en sont emparés et c'est avec plaisir que la CFTC participe à celui organisé par la CRSA.

Pour la CFTC notre système de santé a besoin d'être revu et corrigé. D'abord il est important que la collecte de solidarité qui finance notre Sécurité Sociale au sens large soit bien fléchée et uniquement réinvestie dans le financement du système de santé pour la part qui lui revient.

Il n’est en effet plus acceptable que la succession, année après année, de budgets contraints assène des déficits hospitaliers se rapprochant annuellement du milliard d’euros. Ce n’est pas en réduisant et en démultipliant les coupes budgétaires que l’hôpital améliorera la qualité des soins, quand ceux-ci de leur côté doivent par ailleurs assumer la désertification médicale, l’évolution des coûts, et l’engorgement des urgences sur beaucoup de nos territoires. Faire de l’ambulatoire à tout va devient une industrie de la chasse aux quotas de lits libérés au détriment des pathologies de patients de plus en plus livrés à eux-mêmes et à des Rendez Vous reportés , susceptibles de mettre leur vie en danger.

De tous côtés que ce soit les usagers, patients, bénéficiaires, ou les professionnels de santé, directeurs de structure de soins ou d'hébergement de personnes âgées, et même le gouvernement si en on croit les déclarations rappelées plus haut, les charges de travail des professionnels sont dénoncées. Certes pas forcément pour les mêmes raisons, cependant nous devons prendre soin des professionnels pour qu'ils prennent soin des usagers.

Pour la CFTC une évolution de notre système de santé ne pourra pas se faire sans que les conditions de travail, de rémunération des professionnels, de tout secteur d'activité, soient réellement prises en compte. Comment accompagner chacun lors d'un accident de santé si les professionnels ne peuvent rester écouter, soutenir quand cela fait partie intégrante de la voie de la guérison.

Ainsi, certains spécialistes parlent de souffrance éthique. Celle-ci est la cause de tourments profonds. Les chercheurs l’appellent « la contrainte à mal travailler ». La souffrance éthique est particulièrement perverse. Elle trouve son origine dans une forme sourde de trahison de soi : la contrariété du salarié provient certes de ce qu’on lui fait subir et de ce qu’on l’empêche de réaliser mais aussi de ce qu’il finit par accepter de faire, et qui entre en contradiction avec ses valeurs - en l’occurrence soigner trop vite, ne plus faire attention aux patients, bâcler.

S’ajoute à cette inquiétante souffrance individuelle, la disparition du travail d’équipe qui a pourtant fait ses preuves en favorisant l’harmonie, le savoir-faire et la sécurité du patient.

La dislocation des équipes est en effet l’une des formes répertoriées du management contemporain : il s’agit de suggérer au travailleur, quel que soit son mérite et son niveau de compétences, qu’il est interchangeable. Cette manœuvre vise à le précariser psychologiquement et à le soumettre.

C'est pourquoi la CFTC demande un financement adapté qui permette un personnel en nombre suffisant auprès des personnes accueillies. Les professionnels font le grand écart tous les jours entre leurs valeurs professionnelles et la manière dont les contraintes institutionnelles les obligent à effectuer leurs tâches. Ceci ne peut continuer. Ceci est destructeur sur du long terme. D'ailleurs nous commençons à en percevoir les effets car il y a une baisse de candidats à postuler pour rentrer dans les instituts de formation que ce soit aide-soignant ou infirmier.

La CFTC demande avec insistance depuis des années que le système de financement des établissements soit revu et corrigé. Le 100% T2A est une aberration qui n’avait qu’un seul but la maîtrise comptable, retardant des hospitalisations et mettant la vie de certains de nos concitoyens en danger. Avec le nouveau système de facturation individuel de la prestation de soins assumée par les établissements auprès de la CPAM, la CFTC ose espérer une réelle prise en compte de la dépense de l'établissement par séjour et donc une meilleure reconnaissance du travail accompli, rémunéré à la hauteur de l'engagement des professionnels.

Enfin la CFTC est inquiète de ne rien voir venir pour la mise en place d’une véritable politique liée à la dépendance des Personnes Agées. Si le maintien à domicile est une réponse de transition, elle ne peut se suffire au vieillissement et à la grande dépendance, sans oublier le manque d’attractivité pour les personnels du maintien à domicile, dont les contrats de travail restent de grande précarité.

Si la loi d’Adaptation de la Société au Vieillissement de décembre 2015 a décliné un premier pan de réforme, il manque l’apport complémentaire et indispensable sur les hébergements en structure. Si le Plan Solidarité Grand Age de Philippe BAS (2007 – 2012) avait énoncé un programme ambitieux pour améliorer les ratios des personnels auprès de nos aînés en structure, il n’aura été qu’une goutte d’eau qui se sera vite asséchée pour ne pas avoir mis en correspondance les moyens financiers nécessaires. On ne pourra pas toujours faire l’économie d’une profonde réforme, si nous voulons laisser nos aînés toujours de plus en plus nombreux, et parfois délaissés par des familles éclatées, s’en aller dans le respect et la dignité humaine qui leur sont dues. L’UR CFTC Bretagne refuse que les salariés actifs sacrifient une seconde journée de travail au noir, contraire à toute éthique morale, à savoir que tout travail mérite salaire, pour financer la grande dépendance. La problématique du 5ème risque, longtemps écartée doit être affirmée afin de mettre en place les financements qui permettront de préserver un régime par répartition en lieu et place d’un régime assurantiel qui ne manquerait pas, de laisser une grande part de notre population sur le bas-côté de la route.

En conclusion, la santé reste la plus belle richesse attachée à chacun d'entre nous. Son devenir ne peut être le fait ou n’appartenir qu’aux décisions d’une minorité soi-disant bien-pensante. Le système, depuis qu’il a été pris en charge par l’état et les parlementaires n’a fait que subir des restrictions sans fin, en tous sens, frappant le plus souvent, de plein fouet les personnes les plus fragiles et les plus précaires, qui, au fil des années ont de moins en moins accès aux soins et doivent faire face à des dépassements d’honoraire ou des restes à charge pour le moins inacceptables. On nous parle depuis 20 ans, de plus de qualité par une meilleure coordination et une meilleure organisation par la rationalisation, avec des moyens et des choix arrêtés, rejetant toute approche humaniste des soins et conduisant à la désertification médicale. La transformation du monde du travail et la destruction des emplois n’ont pas entraîné, en leur temps, les mesures correctionnelles indispensables qui auraient permis de préserver son équilibre. Retrouver ces équilibres par l’unique lorgnette de la maîtrise des dépenses n’est qu’une demi-réponse lorsque celles-ci augmentent et que les ressources diminuent. Le moment est donc venu, de quitter le mode de rapiéçage à répétition, pour une véritable réforme de fond en mettant au tour de la table une véritable démocratie participative ascendante, et une gouvernance nationale neutre, sans emprise, à l’écoute des français.
Le temps est donc là pour réfléchir au renouveau de notre système de protection sociale en l’adaptant aux nouvelles trajectoires professionnelles. Celles-ci sont de plus en plus marquées par des transitions d’un emploi à un autre. Plutôt que la remise en cause du « modèle de 1945 », la CFTC croit en une troisième voie qui garantirait la continuité et la sécurité des droits des personnes, salariés ou indépendants à toutes les étapes de leur vie par la création d’un Régime Social Universel d’Activité. La CFTC est prête à relever le défi qui ne serait plus seulement un droit du travailleur mais un droit de l’humain. Nous passerons alors d’une logique de réparation à une logique d’investissement visant à l’autonomie de chacun dans la gestion du risque et de son parcours.